La cuisine рéruѵіеnnе est particulièrement riche car c'est une gastronomie de mélanges : mélange d'ingrédients très divers, avec trois écosystèmes très différents, aux antipodes même, le Pacifique, les Andes et l’Amazonie, qui produisent des ingrédients très variés. Mélange des civilisations, aussi, avec les civilisations précolombiennes, conquistadors espagnols, esclaves africains et immigrés asiatiques. Le perpétuel métissage des populations qu’a connu le Pérou se retrouve dans cette cuisine renommée.
Renommée ? Oui, mais surtout dans l'hémisphère sud. En Europe, elle est très peu connue ! Même si la saison 13 de TopChef a invité Pía León qui nous a fait découvrir le maïs, je vous mets au défi de me donner cinq plats typiques de la cuisine péruvienne !
Fruits et légumes, le pays des records
Le Pérou a une particularité : l'altitude de ses territoires monte du niveau de la mer à 7.000 mètres sur une relativement courte distance. Cela donne donc une variété de climats, du tropical au tempéré, sur une courte distance.Et donc la coexistence sur les marchés de très nombreux fruits et légumes.
C'est pourquoi, au Pérou, vous dégustez à la même saison des fruits de climat tempéré, comme des fraises, ou des fruits tropicaux tels que la lucuma, au goût de sirop d’érable. Ainsi il est courant de croiser des marchands de jus de fruits frais dans la rue ou de savourer des glaces aux saveurs exotiques. (Au Maroc, on n'a que les marchands de jus, les glaces c'est moins ça…)
Les légumes ne sont pas en reste ! En effet, le pays en dénombre une impressionnante variété puisque l’on répertorie du maïs, des patates douces ou encore du lima agria, citron vert, qui sont des ingrédients très employés dans la gastronomie péruvienne.
Et surtout, puisque le Pérou est la terre d'origine de la patate, on y trouve plus de 2 500 sortes de pommes de terre.
Pour relever le goût de ses plats divers, la gastronomie péruvienne use et abuse de l’aji amarillo et du rocoto, deux piments aux saveurs prononcées.
Méconnu en occident, le caigua est un légume à la croisée du concombre et du poivron. La chair est craquante, aqueuse avec un goût assez neutre. On le cultive aussi dans l'est de l'Afrique et même au Bhoutan ! alors que c'est a priori un légume tropical. Vous ne le trouverez pas en dehors des pays où on le cultive, car c'est plutôt une culture vivrière. Mais j'ai trouvé une recette de caiga farcie qu'on peut, je crois adapter aux poivrons.Il parait même qu'on utilise le jus de caigua quand on veut perdre du poids, un verre tous les matins… mais qu'il est extrêmement amer !
Les habitudes alimentaires
Le matin, les péruviens aiment débuter leur journée par une tasse d’émoliente qui est une boisson chaude à base d’orge grillé, de jus de citron et d’herbes médicinales. Servie par les marchands ambulants, elle est populaire pour ses propriétés médicinales et sa forte teneur en vitamine C.
Afin d’éviter les petits creux, la parade ordinaire est de boire une infusion de feuilles maté de coca. Ses bienfaits sont multiples : coupe-faim, résistance à la fatigue et au mal d’altitude. Le yerba maté est aussi la boisson nationale de l’Argentine !
Moins diététiques, le lait au chocolat, les chips de patate douce et de bananes, ou les cacahuètes et les grains de maïs toastés font le plaisir des papilles péruviennes ! Et ça, on peut le reproduire facilement !
A toute heure de la journée, les locaux aiment également savourer une boisson à base de maca, une plante aux propriétés exceptionnelles, ou l’Inca Kola, le soda incontournable aromatisé à la verveine citronnée.
Les cuisines péruviennes
A la genèse, la cuisine Inca
L'Empire Inca, à son apogée, était immense, extrêmement riche et raffiné. Sophistiquée de par son infinité de styles de cuissons, la cuisine Inca exploite avec finesse les produits de son environnement naturel. Elle s'exporte aussi très bien, et on trouve des restaurants incas même à Paris !
A l’époque Inca, il était très commun de consommer du gibier alors qu’aujourd’hui, les peuples andins leur préfèrent les viandes de lamas et d’alpaca. Plus atypique, le cuy, une espèce de cochon d’inde cuisiné en barbecue, est l’un des plats préférés. Les viandes sont principalement accompagnées de tubercules, d’avocats ou de quinoa puis mijotées sous forme de ragoûts ou de bouillons.
Sur la côte littorale, les crustacés et les poissons ont la part belle d’autant plus que le Pérou compte plus de 2.000 sortes de poisons de mer et d’eau douce ainsi que des crustacés.
Pour relever leurs plats variés, les héritiers de la civilisation Inca optent pour des épices fines telles la griffe de chat ou des fruits exotiques. Par ailleurs, il est commun d’accompagner ces recettes millénaires de chicha de jora, une boisson alcoolisée à base de maïs. Son pendant non alcoolisé se nomme chicha morada et prend la couleur violette du maïs utilisé pour sa préparation ainsi que son goût.
Cuisine Novo-andine, audacieuse
D’origine autochtone, la cuisine novo-andine se veut ambitieuse en puisant sa source dans les plats précolombiens qu’elle accommode à de nouvelles techniques de cuissons.
Né dans les années 1980, ce courant culinaire a été initié par le chef cuisinier Bernardo Roca Rey, qui s’est donné le défi de préparer des plats occidentaux à partir d’une matière première locale.
Il a, par exemple, créé un risotto à base de quinoa en échange du traditionnel riz rond. D’autre part, les herbes aromatiques andines et les sauces, à base de maracuyá, apportent des saveurs inédites aux plats. C'est ce courant que Pía León et son mari Virgilio Martínez ont magnifié et fait connaître, avec la récompense accordée à la jeune cheffe.
A travers le Pacifique, le métissage des genres
Le Pérou a su s’inspirer de l’art culinaire asiatique introduit par les migrants japonais et chinois.
La cuisine Nikkei
La fusion Pérou-Japon s’opère suite aux successives vagues de migration en provenance du Japon. En effet, les Nikkei, nom donné aux migrants japonais du Pérou, ont choisi de revisiter leurs plats favoris à partir des produits locaux. Cet apport culinaire se manifeste par une courte cuisson à la vapeur et une mise en valeur des saveurs naturelles des ingrédients : maïs, noix de coco, citron vert, coriandre…
L’influence nippone a également démocratisé la consommation de poisson cru ou à peine mariné : le ceviche.
La cuisine Nikkei connaît alors une reconnaissance mondiale grâce à sa figure emblématique, Gastón Acurio.
Aujourd’hui, le chef péruvien, ayant fait ses armes au sein de la prestigieuse école de cuisine française le Cordon Bleu, est à la tête d’une trentaine de restaurants en Amérique latine et en Europe. En France, Gastón Acurio réalise régulièrement des collaborations auprès des grands noms de la gastronomie française tels qu’Alain Ducasse. Il a surtout ouvert un restaurant à Paris, le Manko.
Il a aussi, avec d'autres chefs péruviens, fait un livre de cuisine, sobrement intitulé "Pérou : le livre de Cuisine", un bel objet chez Phaïdon, qui contient 500 recettes !
La cuisine Chifa
L’apport asiatique dans la gastronomie péruvienne puise également sa créativité dans les plats chinois importés par une migration ayant connue son apogée dans les années 1800. Ce métissage a ainsi créé la cuisine Chifa, très appréciée des péruviens. Les restaurants chifas présentent des plats copieux à partager en famille où on y goûte le lomo saltado, traduisez par un filet sauté, ou l'arroz chaufa ; similaire au riz cantonnais, il a la spécificité de se décliner en plusieurs types.
Boissons et cocktails
Les péruviens sont à l’origine de nombreuses boissons alcoolisés dont l’incontournable Pisco sour, un cocktail réalisé avec une eau-de-vie éponyme, et du citron vert. Pour la petite histoire, le Pérou et le Chili se disputent la paternité du Pisco depuis des siècles et le mystère n’est pas encore résolu !
Le vin péruvien est apparu au XVIe siècle, à l’époque des conquistadors espagnols. A ce jour, les vignes se situent dans la région d’Ica, là où les températures sont plus propices à leur culture. C'est un endroit très particulier : en effet, le Pérou est un pays très sec, où il ne pleut pratiquement pas… la vigne se développe donc uniquement dans des oasis, avec quelques domaines très connus, comme Tacama.
Les vins péruviens sont essentiellement des cabernet-sauvignons, avec quelques syrah, malbecs et merlots. En dehors de la France, qui a tendance à ignorer tous les crus étrangers, ils sont appréciés, avec des saveurs fruitées.
C'est d'ailleurs dans la même région qu'on fabrique le Pisco, puisque celui-ci est un alcool de raisin. La plupart des exploitants mélangent dans leurs chais tonneaux de vin et jarres de pisco !
Pourquoi je vous raconte tout ça ? Parce que beaucoup de ces recettes peuvent s'adapter au Maroc. Et que j'aime beaucoup le poisson et la variété des préparations avec le maïs ou la patate douce !